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Comment le centre hospitalier de Saint-Martin a ressuscité son SI en 4 jours…

Par Marie Varandat, publié le 20 août 2020

Frappé de plein fouet par l’ouragan Irma, le centre hospitalier perd une de ses salles informatiques. Mais grâce à son infrastructure redondante, il a redémarré son système d’information sans perte de données dès que l’électricité a été stabilisée dans l’île, soit quatre jours après le passage du terrible cyclone.

Par Marie Varandat

En septembre 2017, un ouragan de la taille de la France a balayé l’Atlantique nord. Avec ses vents à 287 km/h, Irma, classé en catégorie 5 sur l’échelle de Saffir-Simpson, a été l’un des ouragans les plus puissants de l’histoire et des plus dévastateurs : 40 morts, des millions de personnes évacuées…

Au cœur de l’ouragan, l’île de Saint-Martin a été particulièrement touchée : 95% de ses infrastructures ont été détruites, plus d’eau potable ou d’électricité…

JEAN-FRANÇOIS DESRUMAUX
Chef de projet informatique du CH Louis Constant Fleming sur l’île Saint-Martin
« Au bout de quatre jours, nous avions la stabilité électrique pour relancer l’informatique. Mais il a bien fallu entre 15 jours et 3 semaines pour retrouver un fonctionnement “normal” du SI »

Situé sur la partie française de l’île, le centre hospitalier Louis Constant Fleming a été ravagé. Son toit a été en partie arraché, exposant une de ses salles informatiques aux intempéries, ce qui a provoqué son arrêt total.

Quand l’alerte a été donnée, le mode confinement a été lancé : tous les patients transportables ont été évacués sur La Guadeloupe, sur la Martinique ou directement chez eux, quand c’était possible. Les autres ont été regroupés à un seul endroit de l’hôpital avec une équipe médicale. « Notre priorité va bien entendu à la prise en charge des patients et nous avons des groupes électrogènes pour assurer la continuité des soins. Mais très vite après l’ouragan, relancer le système d’information est devenu une priorité afin de permettre la communication entre les équipes locales ainsi que celles arrivées de la Métropole pour nous prêter assistance », souligne Jean-François Desrumaux, chef de projet informatique de cet établissement. Composé de 80 lits, le centre hospitalier propose une large offre de soins aux 40 000 habitants de la partie française de l’île. Il a mis en place depuis six ans un parcours de soins numérisé grâce au déploiement d’un Dossier Patient Informatisé (DPI).

Lancée en 2013, cette transformation a été réalisée par une équipe de deux personnes : « Mon collègue a la compétence technique hardware & réseau et je m’occupe du système d’information, et plus globalement de l’organisation, explique Jean-François Desrumaux. En outre, notre contexte d’insularité nous contraint à avoir une approche très pragmatique des choses : en cas d’incident, nous ne pouvons pas nous permettre d’attendre que quelqu’un fasse les 8 000 km qui nous séparent de la France pour réparer. C’est pourquoi il nous faut des expertises locales et des solutions aussi automatisées que possible afin de limiter notre charge de travail et garantir la continuité de service ».

Ces contraintes ont conduit le CH à opter dès 2013 pour une infrastructure redondante, répartie dans deux salles distinctes. « Le maillage de la fibre n’est pas encore suffisamment développé sur l’île pour que nous envisagions des sites distants, précise Jean-François Desrumaux. C’est pourquoi nos deux salles sont situées aux extrémités d’un même bâtiment, à des étages différents ».
L’infrastructure intègre la solution software-defined storage SANsymphony de DataCore, retenue parce qu’elle répondait aux besoins de redondance, de haute disponibilité et d’automatisation, mais aussi parce que la technologie était maîtrisée sur l’île par un prestataire informatique : C2I Karaibes.
Un choix dont le CHU s’est particulièrement félicité après l’ouragan, car quatre jours après Irma, soit le laps de temps nécessaire pour rétablir une alimentation électrique stable, il permettait de relancer le système d’information malgré la destruction de la salle informatique principale.

Architecture de l’infrastructure

Avant le passage d’Irma, le dispositif en production comprenait dans chaque salle 2 nœuds IBM x3650 M4 (siys Xeon E5-2560 avec 128 Go de RAM et 2 SSD internes) sous vSphere 5. Un ensemble vu comme un cluster de 4 nœuds à travers les fonctionnalités HA et DRS de VMware. Chaque salle disposait de sa propre baie IBM Storewize V3700. Pour garantir une totale redondance du stockage, SANsymphony réalisait une réplication bi-directionnelle en temps réel entre les deux baies. La sauvegarde était opérée dans la salle principale par un NAS Matrix DataClone doté de disques amovibles de 5 To, ensuite externalisés. En résumé, le centre hospitalier avait adopté une approche simple, pragmatique et efficace.

Lorsqu’Irma détruit la salle principale, les mécanismes HA & DRS de vSphere ont permis à toutes les VM d’être exécutées par la salle 2 quand celle-ci a enfin pu redémarrer. « Notre priorité a été de nous reconnecter au monde en relançant les serveurs de messagerie, raconte Jean-François Desrumaux, afin de permettre aux équipes médicales, venues en urgence de la Métropole pour certaines, de communiquer ».

Dans un second temps, et afin de maintenir un fonctionnement nominal de toutes les VM sur les deux nœuds survivants, la DSI a consolidé les ressources de sa salle 2, en passant la mémoire vive de chacun des nœuds à 384 Go. Une nouvelle sauvegarde NAS Matrix a aussi été acquise.

Le centre hospitalier Louis Constant Fleming

Durant le temps nécessaire à la reconstitution de la salle principale, l’hôpital a donc confié sa résilience aux incidents à ses seules sauvegardes. « Au bout de quatre jours, nous avions la stabilité électrique pour relancer l’informatique. Mais il a bien fallu entre 15 jours et 3 semaines pour que les gens puissent de nouveau circuler sur l’île et retourner travailler… et retrouver un fonctionnement “normal” du SI », ajoute JeanFrançois Desrumaux.

Fin novembre 2017, le centre hospitalier s’est attaqué à la reconstruction de sa salle principale. Les technologies ayant évolué depuis 2013, la salle a été rebâtie avec deux nouveaux nœuds IBM x3650 M5. Une migration vers vSphere 6.5 a été opérée par la même occasion.

La solution de Datacore, pour sa part, a été hébergée dans la salle reconstruite sur un nouveau serveur IBM x3250 M6, associé à une nouvelle génération de baie IBM Storewise V32700 V2. « Il a fallu s’assurer de la compatibilité, d’autant que pour offrir plus de souplesse, la fonctionnalité “Stretch & Cluster” de SANsymphony a été activée afin de ne plus présenter le stockage comme deux espaces répliqués, mais comme un seul espace logique de 20 To. Au final, la reconstruction nous a presque pris un an », se souvient Jean-François Desrumaux.

Éco-responsable, le centre hospitalier a aussi récupéré ses anciens serveurs pour construire une infrastructure secondaire autonome capable d’assurer le redémarrage du système dans le cas d’une défaillance majeure de l’infrastructure principale.

L’entreprise : 

Activité : Médicale (Plus de 25 000 journées d’hospitalisation par an)

Effectif : Autour de 40 médecins et de 300 personnels. 2 salariés à la DSI.

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