Dev
Crise des dettes : le ciel s’assombrit pour les SSII
Par La rédaction, publié le 15 septembre 2011
La descente aux enfers des banques françaises pourrait les conduire à geler un certain nombre de projets informatiques. Interview de Philippe Madar, directeur associé chez Aedian.
Au cœur de l’été, Guy Mamou-Mani, président de Syntec numérique, redoutait que la crise des dettes souveraines ne vienne ralentir les investissements informatiques. En dépit du sursaut du CAC 40 depuis trois jours, cette menace prend aujourd’hui forme.
Attaquées en Bourse pour leur exposition au risque, les banques françaises doivent donner des gages au marché. Lundi, Société Générale a annoncé qu’elle céderait des actifs et conduirait un plan de réduction d’effectifs dans certains pays. Le point de vue de Philippe Madar, directeur associé chez Aedian, SSII spécialisée dans le tertiaire financier.
Philippe Madar : Je ne constate pas de ralentissement vraiment significatif de l’activité. Les clients continuent à exprimer des demandes d’assistance. Pour l’heure, les décisions des banques ne se traduisent pas encore dans nos carnets de commandes. Nous sommes toujours sur les budgets 2011. En revanche, un certain nombre d’informations filtrent sur la définition des budgets 2012.
Un gel de certains projets est évoqué avec une conséquence très probable sur l’appel à la sous-traitance. Ainsi, on parle de 300 à 400 prestataires de moins dans une grande banque française. La rechute de la crise est prise très au sérieux. Nous n’avons toutefois pas constaté d’arrêts massifs et immédiats de projets comme au lendemain du 11 septembre 2001, par exemple.
Quels types de projets pourraient être affectés ?
PM : Je n’imagine pas le Crédit Agricole arrêter son projet Nice ou la Société Générale son rapprochement informatique avec Crédit du Nord, etc. Mais sur des projets de taille moyenne, des coupes sombres pourraient intervenir.
Le couperet ne devrait pas tomber brutalement. Il y a beaucoup d’itérations avant d’arrêter un budget définitif. Mais je ne vois pas comment on ne demandera pas aux DSI de faire des économies, compte tenu de l’importance que représentent les budgets informatiques. Des annonces de report, de décalage de projets sont d’ores et déjà prévisibles.
Sans tomber dans un optimisme béat, on peut aussi penser que la stabilisation voire la diminution des effectifs internes annoncées par certains groupes bancaires pourraient avoir des conséquences positives sur le recours à la sous-traitance.
Quelle attitude peut adopter un prestataire face à la crise ?
PM : Compte tenu de ce contexte, pour le moins, volatile et incertain, nous nous devons de proposer, à nos clients, dans cette période difficile pour eux, des offres intelligentes.
En lieu et place des classiques placements en régie, Aedian propose de plus en plus des forfaits sur site ou délocalisés, mais aussi la mise en place de centre de compétences notamment en s’appuyant sur notre filiale en Tunisie.
Nous assurons un pilotage très serré de notre activité. En attachant beaucoup d’importance au renouvellement de mission en délégation de compétence dont la périodicité contractuelle est souvent trimestrielle. A ce jour, notre visibilité est correcte jusqu’à la fin d’année.
Ainsi, en terme de recrutement, nous n’avons pas changé notre prévisionnel pour l’année en cours qui sera supérieur à 100 embauches. La frilosité vient plutôt des candidats qui n’osent pas bouger et prendre le risque d’une nouvelle période d’essai.
Peut-on s’attendre à un recours accru à l’offshore ?
PM : Oui. C’est un levier pour dégager des économies même si les banques sont déjà très offshorisées. L’opération reste néanmoins périlleuse car la qualité des livraisons est loin d’être celle attendue, allongeant d’autant la période de recette et augmentant les risques d’incidents en exploitation.
Naturellement, cette période complique aussi les négociations entre prestataires et donneurs d’ordres via notamment le renforcement du rôle, déjà très important, des acheteurs.
Et si la chute du CAC 40 devait se poursuivre…
PM : On pourrait s’attendre à un gel des investissements. De plus, si les mauvaises nouvelles sur l’Italie, voire sur l’Espagne, se confirmaient, le risque pour certaines banques françaises serait accru, avec des conséquences importantes sur leurs projets et donc sur l’activité de service. Ceci de manière beaucoup plus significative qu’avec la crise grecque.