Les dépenses Cloud des entreprises restent mal gérées

Cloud

De nombreuses dépenses dans le cloud encore à optimiser

Par François Jeanne, publié le 22 juillet 2024

Au-delà des augmentations conjoncturelles des budgets cloud, liées par exemple aux expérimentations des entreprises sur l’IA, d’autres sur-dépenses évitables restent malheureusement la norme. Alors que la hausse tendancielle des tarifs des providers et autres éditeurs SaaS se poursuit, il est temps de mettre une stratégie FinOps à l’ordre du jour.

Plateforme SaaS d’observabilité et de sécurité des applications cloud, Datadog bénéficie d’un point de vue privilégié sur les infrastructures des entreprises, la performance de leurs applications et l’évolution de leur consommation de services. Dans son étude State of Cloud Costs 2024, le fournisseur analyse les tendances de l’année en cours dans l’écosystème AWS, en s’appuyant sur les données de plusieurs centaines d’organisations. Et elles ne sont pas bonnes pour le budget des DSI.

Le rapport met d’abord en avant la hausse des dépenses en instances GPU, qui atteint 40 % sur un an. D’une certaine façon, il la justifie même, en l’expliquant par les performances de ces processeurs, « jusqu’à 200 % plus rapides que les CPU sur du traitement parallèle », ce qui les rend particulièrement bien adaptés aux projets d’IA et sur les LLM.
« Aujourd’hui, l’instance de type GPU est largement utilisée et la moins onéreuse. De nombreux clients sont encore en phase d’expérimentation […] et ils appliquent [ces instances] à leurs premiers projets d’IA adaptative, d’inférence de machine learning et d’entraînement à petite échelle », confirme Yrieix Garnier, VP of products chez Datadog.

La gabegie des conteneurs

Réjouissons-nous de l’explicabilité de cette dépense, qui relève d’une stratégie compréhensible. Mais que dire des autres éléments relevés dans le rapport ? Car ce dernier pointe en effet des dépenses mal maîtrisées dans de nombreux domaines.

Les conteneurs, par exemple, posent un vrai problème. En effet, 83 % de la facture associée concerne des ressources inutilisées : 54 % vient des clusters inactifs, c’est-à-dire « du coût du sur-provisionnement de l’infrastructure des clusters » ; 29 % des charges de travail inactives, c’est-à-dire « des demandes de ressources plus importantes que ne l’exigent ces charges ». Datadog relève au passage que les entreprises allouent une part croissante de leur capacité de calcul à l’exécution de ces conteneurs, 35 % aujourd’hui contre 30 % il y a un an.

Ce n’est pas tout. Les DSI semblent aussi négliger les nouvelles offres d’infrastructures d’AWS, plus performantes et moins onéreuses. 83 % d’entre elles consacrent encore en moyenne 17 % de leur budget EC2 à des technologies de la génération précédente. Elles éprouvent aussi des difficultés à tirer parti des programmes de remises pour Amazon EC2, Amazon RDS, Amazon StageMaker et d’autres, puisqu’elles ne sont plus que 67 % à y adhérer, contre 72 % l’année dernière.

En revanche, les instances exploitant des processeurs Arm enregistrent un intérêt croissant, avec 18 % du budget de puissance de traitement EC2 qui leur sont consacrés, le double de l’année dernière. Comme ces instances consomment jusqu’à 60 % d’énergie en moins que les instances EC2 similaires, c’est une bonne nouvelle pour la planète, et il n’y en a pas tant.

Car cette analyse démontre à l’envi qu’en matière d’optimisation, technique ou financière, il reste beaucoup à faire dans les entreprises. La pensée magique qui a prévalu ces dernières années pour justifier les stratégies « cloud first », a beau être depuis pas mal d’années contredite par les chiffres, les cellules FinOps, quand elles existent, n’ont pas repris la main, loin s’en faut.

Et comme la mainmise des cloud providers américains sur le marché européen se renforce, en l’absence d’une concurrence domestique suffisante et avec la perspective d’un EUCS plus permissif que SecNumCloud en termes de souveraineté, les factures salées ont encore de beaux jours devant elles.


Les dépenses dans le SaaS mieux contrôlées ?

Selon l’éditeur Vertice, les dépenses des entreprises dans le SaaS ont augmenté de 35 % entre mi-2022 et mi-2023, et les tarifs eux-mêmes ont crû de 8,7 % sur la même période selon Gartner (pour une inflation estimée à 4,2 % par l’Insee).

Mais une analyse de Zilo, un spécialiste du SaaS management, apporte un peu d’espoir. En scrutant son parc clients à la loupe, il relève que, certes, en 2023, ceux-ci ont gaspillé encore en moyenne 18 M$ en abonnements inutiles. Mais dans le même temps, le budget SaaS moyen a reculé de 10 % environ pour s’établir à 45 M$, ceci venant après une baisse déjà en 2022 de 16 %.

Le portefeuille moyen d’applications souscrites recule également de 291 (en 2022) à 269. Faut-il y voir un lien de cause à effet ? La DSI ne contrôle en tout cas directement que 17 % de ces abonnements, qui représentent 28 % de la dépense globale. Le reste est engagé par les métiers et parfois même par des collaborateurs utilisant leurs cartes de crédit avant de faire passer leurs achats en notes de frais.

Avec un manque de gouvernance qui conduit à ce que 51 % des droits d’usage souscrits ne sont finalement plus utilisés…



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