Cloud
Les mainframes aussi rêvent d’IA
Par Laurent Delattre, publié le 12 septembre 2024
Le mainframe fait encore et toujours de la résistance. Le dernier rapport Kyndryl sur la modernisation des mainframes révèle que 86% des DSI envisagent d’y déployer des outils d’IA générative, certains ayant déjà déployé de premiers projets…
Les mastodontes de l’informatique sont toujours là et bien vivants. D’ailleurs le marché est toujours en croissance. Évalué à un peu plus de 5 milliards de dollars en 2022, il devrait connaître une croissance régulière durant cette décennie pour dépasser les 6 milliards de dollars en 2032. Et ceci malgré les efforts des hyperscalers (AWS Mainframe Modernization Services, Google Mainframe Connector et Google Cloud G4, Azure Mainframe Migration) pour simplifier les migrations des workloads ancestraux de ces monstres vers leur cloud.
IBM est désormais le seul acteur du marché à encore innover dans ce domaine. Sorti en 2022, le Z16 est encore au sommet de ses ventes, mais Big Blue a déjà dévoilé les processeurs qui animeront le futur Z17. Dans l’univers Z, les cycles de renouvellement raccourcissent.
Et si le Mainframe est toujours là, c’est non seulement parce qu’il fait encore tourner un patrimoine applicatif (principalement bancaire et financier) essentiel et critique, mais aussi parce qu’il a su évoluer et se moderniser adoptant Linux, le DevOps, le cloud hybride,
Et le Mainframe est encore tellement présent, que la plupart des clients actuels n’envisagent même plus de l’abandonner au profit du cloud, mais cherchent bien davantage à le moderniser et l’intégrer dans les processus de développement modernes : « En 2024, un plus grand nombre de répondants ont confirmé qu’ils se concentrent sur la modernisation du mainframe ou son intégration avec le cloud, tandis que moins d’entre eux choisissent de déplacer les charges de travail hors du mainframe comme stratégie principale – une baisse de cinq points de pourcentage par rapport à l’année dernière (de 30% à 25%). De plus, 53% des répondants ont constaté une augmentation de leur utilisation du mainframe cette année, et 49% affirment que leur utilisation du mainframe augmentera à nouveau dans les 12 prochains mois » explique ainsi Kyndryl qui vient de publier son rapport annuel « State of Mainframe Modernization 2024 ».
Alors, oui, il est vrai que la modernisation du mainframe passe aussi par la migration de certains applicatifs hors de ce dernier. D’ailleurs, 96% des entreprises interrogées (disposant d’un mainframe bien sûr) sont en cours de déplacement de certains workloads vers des infrastructures Cloud ou plus traditionnelles. Elles sont 36% à déplacer ainsi plus d’un tiers des applications de leurs mainframes.
Pas question pour autant de l’abandonner : 86% des DSI considèrent le mainframe comme très important, voire vital, à leur stratégie Business et leurs opérations métiers. Les organisations interrogées conservent en moyenne 56% de leurs workloads critiques sur le mainframe !
La cybersécurité : l’atout maître du mainframe
Et contrairement à une idée répandue, la première des motivations pour conserver le mainframe n’est pas sa capacité à absorber des quantités sidérantes de transactions à la minute. Non, c’est plus simplement la cybersécurité et la conformité !
Dans le contexte actuel d’intensification des cyberattaques, d’augmentation des pressions réglementaires et d’exposition accrue aux risques informatiques, près de la moitié (49%) des responsables IT interrogées citent ainsi la cybersécurité comme le principal moteur de leurs investissements dans la modernisation des mainframes pour l’année à venir.
En effet, 66% des DSI considèrent que le niveau de sécurité inégalé des mainframes est leur caractéristique la plus importante, et 35% ont indiqué qu’une sécurité accrue est un avantage de leurs efforts de modernisation du mainframe.
D’autant que, comme le rappelle le rapport, « la sécurité est également au cœur de la conformité réglementaire ». L’étude révèle ainsi que 92% des DSI interrogés prennent en compte les préoccupations liées à la conformité réglementaire (comme DORA, NIS2 et les réglementations cyber de la SEC) dans leur stratégie de modernisation des mainframes. Les préoccupations réglementaires poussent 28% des répondants à moderniser davantage sur le mainframe, 45% à s’intégrer à des environnements distribués ou de cloud privé, et 19% à répondre aux préoccupations réglementaires en déplaçant les charges de travail hors du mainframe.
Le problème, c’est le manque de talents
Le manque de compétences spécialisées entrave les projets de modernisation des mainframes. En effet, 18% des DSI considèrent l’insuffisance d’expertise sur le marché comme le principal obstacle à leurs efforts d’intégration des mainframes aux autres plateformes. Et 28% des répondants s’inquiètent de ne pas disposer des compétences adéquates internes pour moderniser efficacement leurs mainframes.
Le rapport cite d’ailleurs le témoignage d’un VP d’un grossiste américain – qui a voulu garder l’anonymat – et qui témoigne : « Nous sommes vraiment préoccupés par le manque de compétences requises pour naviguer et mettre en œuvre efficacement les technologies complexes des mainframes et d’intégration de ces mainframes aux projets modernes. C’est un fait bien connu que trouver des personnes compétentes à la fois en mainframes et en développement d’IA de pointe est une tâche très difficile. »
Pour pallier cette pénurie, la moitié des entreprises concernées misent sur le recrutement et la formation de leurs employés. Les investissements se concentrent notamment sur la formation en cybersécurité et conformité réglementaire (43% des répondants), ainsi qu’en analyse de données, IA et IA générative (38%).
LA solution, c’est l’IA
Car, oui, la focalisation sur l’IA du monde IT semble aussi s’étendre aux mainframes. Logique quand on sait l’historique de données qu’ils hébergent. Logique aussi quand on pense à la bande passante et au niveau de parallélisation de ces architectures. Ce n’est pas pour rien qu’IBM a intégré un accélérateur d’inférence au Z16 et qu’elle a déjà annoncé que son futur Z17 disposera à la fois d’un accélérateur d’inférences (IBM Tellum II NPU) et d’un booster d’apprentissage (IBM Spyre).
Pas étonnant dès lors que l’IA soit l’un des thèmes clés de modernisation des mainframes en 2024. Ainsi, 86% des entreprises interrogées prévoient de déployer ou déploient déjà des outils et applications d’IA générative dans leurs environnements mainframes. Et 36% des décideurs considèrent les opportunités offertes par l’IA, y compris l’IA générative, comme un facteur déterminant dans leurs décisions d’investissement pour moderniser les mainframes au cours des 12 prochains mois.
Parallèlement, bien des DSI comptent désormais sur les IA conversationnelles pour compenser le manque de compétences mainframes. Rappelons qu’IBM a lancé cette année son assistant « watsonX Assistant for Z », entraîné sur l’ensemble de la base de savoirs des experts IBM Z, pour améliorer la productivité au quotidien des équipes IT en charge des mainframes, simplifier les tâches d’administration et de maintenance, aider les développeurs et programmeurs systèmes à monter en compétence.
Bref, si les mainframes sont encore là, c’est parce qu’ils ne sont pas une dette technique. Par leur sécurité et leur fiabilité, ils restent au cœur de processus ultra-critiques et les efforts de modernisation d’IBM comme des entreprises clientes leur permettent de s’intégrer dans un environnement IT hybride tout en intégrant des technologies émergentes comme l’IA générative. Le rapport Kyndryl vient ainsi conforter l’idée qu’en termes de ROI, il est souvent plus logique de moderniser son mainframe plutôt que de réécrire leurs workloads pour le cloud…
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