Green IT
Les hyperscalers veulent transformer leurs datacenters en aspirateurs à CO2
Par Laurent Delattre, publié le 09 décembre 2024
Les datacenters, accusés de freiner les objectifs climatiques, s’attaquent désormais à leur propre bilan carbone et émissions de CO2. En combinant intelligence artificielle et matériaux avancés, les initiatives actuelles comme celle annoncée par Amazon en partenariat avec Orbital Materials, redéfinissent – à l’opposé des critiques actuelles – ces infrastructures géantes en puits d’absorption de carbone et système de lutte contre le réchauffement climatique.
Face à la croissance exponentielle des besoins en puissance de calcul, les centres de données se retrouvent aujourd’hui sur la sellette. Les organisations environnementales ne cessent de pointer du doigt ces infrastructures nécessaires aux services numériques du Cloud et de l’IA, dont la consommation électrique et la production de chaleur exercent une pression non négligeable sur les objectifs climatiques.
Le défi pour tous les acteurs du Cloud et des datacenters consiste bien évidemment non seulement à assurer un fonctionnement optimal des serveurs, mais aussi à limiter au maximum leur impact carbone.
À l’occasion de la conférence « AWS re:Invent 2024 », AWS ne s’est pas contenté de se vanter d’avoir alimenté en 2023, 100% de ses opérations Cloud en énergie renouvelable s’enorgueillir de bâtir aujourd’hui des datacenters d’un PUE de 1,04, soit un score presque parfait, mais a également laissé entrevoir un futur où le PUE pourrait être inférieur à 1 et où les datacenters deviendraient de véritables « puits d’absorption de carbone ».
Amazon a en effet annoncé un partenariat original avec la jeune pousse Orbital, spécialisée dans la conception de matériaux avancés grâce à l’IA. L’innovation réside dans l’exploitation intelligente d’une contrainte technique existante. Les datacenters nécessitent d’importants systèmes de refroidissement qui brassent en permanence d’énormes volumes d’air pour maintenir les serveurs à température optimale. Orbital propose d’exploiter ces flux d’air en y intégrant un nouveau matériau capable de capturer le CO2 atmosphérique.
Plutôt que de se tourner vers des solutions externes de compensation carbone, l’idée est d’agir directement sur place, au cœur même de l’un des centres de données d’AWS. Le nouveau matériau développé grâce à l’IA serait capable de capter le dioxyde de carbone issu de l’air chaud des serveurs, sans avoir à déployer une infrastructure coûteuse et complexe.
Ce qui distingue cette approche des solutions traditionnelles de capture carbone, c’est son efficacité économique. Le système promettrait non seulement de compenser les émissions liées à la consommation électrique du datacenter, mais de capturer davantage de CO2 que celui-ci n’en génère indirectement, le tout à un coût inférieur aux crédits carbone disponibles sur le marché.
Ce n’est pas la première incursion de l’industrie technologique dans ce domaine. Des géants comme Alphabet et Meta possèdent déjà des brevets visant à coupler la capture du CO₂ à leurs systèmes de refroidissement. D’autres acteurs, tels que la start-up 280 Earth, développent également des solutions en ce sens. Reste que la mise en œuvre n’est pas sans contraintes : les matériaux ont un prix, le réseau de refroidissement est soumis à davantage de résistances, et une fois le CO₂ récupéré, encore faut-il savoir comment le stocker ou le réutiliser. Dans tous les cas, le calcul économique doit rivaliser avec le simple achat de crédits de compensation, cette solution de facilité bien trop souvent employée par les géants du Cloud (qui achètent notamment des crédits à Tesla) pour enjoliver leur bilan carbone.
Cette initiative d’Amazon et Orbital illustre l’émergence de solutions prometteuses (à défaut d’être réellement concrètes pour l’instant) pour réduire l’empreinte environnementale des infrastructures numériques. Car cette approche s’ajouter à d’autres voies explorées pour rendre les centres de données plus respectueux de l’environnement, comme la modularité des infrastructures, le recours à l’hydrogène pour l’alimentation électrique, ou encore le développement de techniques de refroidissement plus sobres en énergie.
Pour les optimistes de nature que nous sommes, toutes ces pistes dessinent un paysage technologique où les data centers, ces gouffres énergétiques si pointés du doigt et à juste titre aujourd’hui, pourraient à terme contribuer, et non plus nuire, à la lutte contre le réchauffement climatique.
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