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17Cyber : une plateforme pour les protéger tous
Par Thierry Derouet, publié le 17 décembre 2024
Face à l’essor des cybermenaces, le ministère de l’Intérieur, en partenariat avec Cybermalveillance.gouv.fr, déploie 17Cyber. Accessible en ligne 24h/24, ce guichet unique offre une réponse rapide face à 52 types d’attaques numériques.
Alors que la cybermalveillance touche désormais tout le monde, particuliers, entreprises et collectivités, l’État frappe un grand coup avec 17Cyber. Accessible 24h/24, ce guichet numérique inédit promet d’apporter des solutions concrètes et immédiates aux victimes, en quelques clics. Derrière cette plateforme, un collectif d’acteurs unis pour simplifier un parcours souvent chaotique face à des cyberattaques toujours plus nombreuses.
Un phénomène en constante progression
Le constat est implacable. Harcèlement en ligne, escroqueries, usurpations d’identité : les infractions numériques explosent. Jérôme Notin, directeur général de Cybermalveillance.gouv.fr, dresse le tableau : « L’année dernière, nous comptions 3,7 millions de visiteurs. Depuis janvier, ce chiffre dépasse déjà les 5 millions. Quant aux victimes, elles sont passées de 280 000 à 400 000. »
Du côté des forces de sécurité, le Préfet Louis Laugier, directeur général de la Police nationale, complète : « La cyberdélinquance n’épargne personne. C’est 278 703 infractions numériques enregistrées en 2023, avec une augmentation de 40 % en cinq ans. Tout le monde, aujourd’hui, a un exemple dans son entourage. »
Les collectivités aussi sont des cibles de choix. Attaques par rançongiciel, paralysie de services : 55 collectivités ont été touchées en 2023. « Elles représentent 10 % des victimes », souligne un rapport du ministère. Et pour les particuliers ? Neuf Français sur dix déclarent avoir déjà été confrontés à une cybermalveillance. Une réalité crue qui a poussé les acteurs publics à réagir.
17Cyber, un réflexe simple face à une menace complexe
C’est le Général de division Marc Boget, directeur de la stratégie digitale de la Gendarmerie nationale, qui en résume le concept : « On ne parle pas d’une ligne d’urgence comme le 17, mais d’un outil qui doit devenir aussi évident pour les victimes. Il s’agit de replacer les citoyens au cœur du dispositif, avec une solution simple et efficace. »
Le fonctionnement ? En quelques clics, les victimes peuvent identifier la menace grâce à un questionnaire didactique. Si nécessaire, elles accèdent directement à un tchat avec des policiers ou des gendarmes formés. 45 opérateurs spécialisés, disponibles 24h/24 et 7j/7, répondent en temps réel. Pour le Préfet Laugier, « C’est un guichet unique qui vous permet de passer d’un incident à une prise en charge personnalisée, jusqu’à un dépôt de plainte si nécessaire. »
Avec 45 policiers sur la plateforme numérique de Bordeaux et 45 gendarmes entre Rennes et bientôt Poitiers (2025), les effectifs sont mobilisés pour assurer une assistance 24/7. Toutefois, ces opérateurs ne sont pas dédiés à plein temps au 17Cyber, comme l’a confirmé le ministère. La priorité repose sur une capacité de filtration : « Toutes les victimes n’ont pas besoin d’échanger avec un policier ou un gendarme. L’objectif est de débruter au maximum grâce à un parcours d’assistance clair et pédagogique », explique Jérôme Notin.
Seules 11 menaces prioritaires sur les 52 identifiées peuvent actuellement déclencher un échange avec un opérateur humain, une couverture qui devrait s’étendre avec le temps.
Un projet résolument pragmatique, mais aussi humain. Vincent Strubel, président du GIP ACYMA et directeur de l’ANSSI, insiste sur ce point : « Les victimes sont souvent dépassées. Le stress, le désarroi, c’est notre quotidien. 17Cyber vient leur tenir la main, étape par étape, sans qu’elles aient besoin de comprendre la technique. »
Une course sans fin mais une réponse collective
Dans un cyberespace où la menace évolue constamment, la collaboration est au cœur de ce projet. Le Général Boget le souligne avec un brin d’humour : « Si tout seul on va plus vite, c’est bien ensemble qu’on va plus loin. Police, gendarmerie, Cybermalveillance.gouv.fr : tout le monde a joué le jeu pour proposer ce dispositif. »
Les entreprises et collectivités ne sont pas en reste. En complément du site, un module 17Cyber peut être intégré à tous les sites partenaires pour étendre le réflexe. « On veut que ce soit une bouée de sauvetage numérique, accessible partout et pour tous », affirme Christian Pasquetti, directeur général de Mgéfi et partenaire dans le déploiement de ce dispositif.
La visibilité, le nerf de la guerre
Si le dispositif 17Cyber est opérationnel, sa visibilité reste un défi. À ce jour, aucune campagne publicitaire d’envergure n’a été financée. Le ministère mise sur le soutien des partenaires (La Poste, Meta, Carrefour, Qwant, etc.) pour relayer la plateforme et déployer le module. Un constat que Vincent Strubel partage sans détour : « On a une solution qui fonctionne, mais il faut la faire connaître. Il faut que chaque Français sache que ce réflexe existe. »
Un premier pas, « mais sûrement pas le dernier »
Ce lancement du 17Cyber, fruit de deux ans de travail collaboratif, n’est qu’une première pierre. « C’est une étape essentielle, mais nous continuerons d’évoluer avec les besoins des victimes », promet Jérôme Notin. Le dispositif s’intègre dans une stratégie plus large, portée par le ministère de l’Intérieur. Comme le rappelle le Général Boget : « Protéger nos citoyens, c’est une priorité absolue. Les criminels s’adaptent. Nous aussi. »
17Cyber : une aide avant tout humaine
Lors de sa présentation, Nicolas Laurent, le Directeur de projet Cybermalveillance.gouv.fr a simulé un cas concret : un directeur général des services (DGS) d’une commune victime d’un rançongiciel. En quelques étapes, il a illustré la simplicité du parcours proposé par 17Cyber :
1. Diagnostic rapide : L’utilisateur qualifie son profil (entreprise, particulier, collectivité) et décrit l’incident. La plateforme identifie la menace et propose des actions réflexes immédiates (déconnexion des machines, alerte au service informatique).
2. Assistance personnalisée : Pour les incidents critiques, l’utilisateur peut dialoguer en tchat sécurisé avec un policier ou un gendarme. L’agent guide la victime grâce à un outil d’aide à la décision pour poser les bonnes questions et donner les conseils adaptés.
3. Synthèse et orientation : Un bilan est généré avec les conseils donnés et l’orientation vers la brigade ou le commissariat compétent, facilitant ainsi la prise en charge sur place.
Pas (encore) de budget pour une campagne nationale
La situation budgétaire de la France reste marquée par la reconduction à l’identique du budget 2024 pour 2025, laissant peu de marge de manœuvre pour financer de nouveaux dispositifs. Ainsi, aucune enveloppe n’a été spécifiquement allouée pour financer une campagne de communication massive autour de 17Cyber. Le lancement repose donc sur une stratégie minimaliste, s’appuyant sur l’intégration volontaire du module par des partenaires publics et privés. Cette approche progressive, si elle limite les coûts immédiats, pose toutefois la question de la visibilité du dispositif auprès des victimes.
Pour plus d’informations et accéder au dispositif : 17cyber.gouv.fr.
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