Baromètre Green IT 2025

Green IT

Baromètre Green IT 2025 : une prise de conscience en progression, des actions encore insuffisantes

Par Marie Varandat, publié le 19 mars 2025

Sobriété numérique, écoconception, accessibilité : les progrès s’accélèrent, les entreprises gagnent en maturité, mais les réalités économiques et les complexités règlementaires freinent encore leur adoption à grande échelle. Les entreprises naviguent encore trop à vue entre engagement et contraintes budgétaires. Le Baromètre Green IT 2025 met en lumière les paradoxes actuels et l’écart persistant entre intentions et actions concrètes.

L’Alliance Green IT (AGIT) a récemment publié la quatrième édition de son Baromètre Green IT, offrant une analyse approfondie de la maturité des entreprises françaises en matière de numérique responsable. Si la sensibilisation aux enjeux environnementaux du numérique est désormais bien ancrée, les actions concrètes peinent encore à suivre, avec des disparités importantes selon les domaines étudiés.

Loin d’un basculement massif vers un numérique plus durable, cette édition 2025 révèle un écart persistant entre les bonnes intentions affichées et la mise en place effective de solutions à impact mesurable.

Un engagement croissant, des actions concrètes limitées

Menée auprès de 588 organisations de tous secteurs et de toutes tailles, l’étude conduite par l’AGIT avec le soutien de l’ADEME se veut très complète avec pas moins de 400 questions posées autour de huit thématiques : infrastructures informatiques, data centers, impression, achats, fin de vie des équipements, gouvernance, postes de travail et services numériques.

Bien que la sensibilisation aux enjeux environnementaux du numérique progresse, la mise en œuvre d’actions concrètes demeure limitée. De nombreuses entreprises ne mesurent pas précisément leur impact environnemental et n’ont pas encore défini de stratégie Green IT claire.

Gouvernance : une structuration en progression

Les entreprises commencent à structurer davantage leur approche du numérique responsable, notamment en désignant des responsables dédiés à ces sujets. Aujourd’hui, 39 % des organisations ont nommé un responsable Green IT, contre 27 % en 2020.

Cette évolution s’accompagne d’une intégration croissante de ces rôles au sein des directions stratégiques : 73 % des responsables Green IT siègent désormais au CODIR ou au COMEX, une nette progression par rapport à 2020 où ils n’étaient que 21 %.

L’alignement entre la stratégie Green IT et la politique RSE de l’entreprise se renforce également, passant de 28 % en 2020 à 40 % en 2024, avec une quinzaine d’indicateurs partagés, notamment dans les grandes entreprises.

Si près de la moitié des entreprises (44%) prennent en compte les critères environnementaux lorsqu’elles choisissent leur matériel, elle ne sont que 22% à le faire dès qu’il s’agit de logiciel, preuve que l’éco-conception n’est clairement pas encore ancrée dans les mœurs des entreprises.

Consommation énergétique : entre contrainte budgétaire et optimisation environnementale

Face à la flambée des prix de l’énergie et à l’évolution des normes environnementales, de plus en plus d’entreprises prennent en compte leur consommation énergétique.
En 2020, seules 4 % des organisations déclaraient mesurer la consommation énergétique de leur parc informatique. En 2024, ce chiffre grimpe à 55 %.
Plus largement, 53 % des entreprises surveillent désormais la consommation électrique de leurs activités, une progression de 22 points par rapport à la précédente édition du baromètre.

Si cette évolution est encourageante, elle relève moins d’une réelle adoption du Green IT que d’une réponse pragmatique aux pressions économiques. Avec la hausse des coûts de l’énergie, FinOps et Green IT se rejoignent, la réduction de la consommation étant souvent motivée d’abord par des considérations financières avant de s’inscrire dans une démarche environnementale.

Écoconception et accessibilité : des efforts encore insuffisants

L’écoconception s’impose progressivement comme un levier d’optimisation des impacts environnementaux. Aujourd’hui, 59 % des entreprises qui développent des applications intègrent les bonnes pratiques du numérique responsable, un progrès significatif depuis l’édition précédente du baromètre (34%).

L’accessibilité numérique suit également une tendance positive, bien que les efforts restent insuffisants. Entre 2020 et 2024, la part des entreprises appliquant les bonnes pratiques d’accessibilité a plus que doublé, passant de 20 % à 51 %. Cette évolution est particulièrement visible dans les petites entreprises : 67 % des structures de moins de 10 salariés affirment désormais respecter cette obligation.

Des freins persistants à surmonter

Malgré ces avancées, plusieurs obstacles ralentissent encore la transition vers un numérique plus responsable. Les critères RSE restent absents de nombreux processus d’achats, avec seulement 36 % des entreprises les intégrant dans leurs appels d’offres.

La gestion de la fin de vie des équipements demeure également problématique, avec des filières de collecte et de recyclage encore insuffisamment développées. Faute d’accords avec leurs fournisseurs, de nombreuses entreprises se retrouvent confrontées à un surcoût pour assurer elles-mêmes la reprise et le traitement de leurs équipements obsolètes. Ce qui explique aussi très probablement le fait que seulement 36% des entreprises confient leurs équipements usagés à un éco-organisme alors qu’elles sont 64% à connaitre la réglementation sur les déchets électroniques (DEEE).

Côté achats, le recours au matériel reconditionné peine à s’imposer, en partie à cause d’un paradoxe économique : son prix est souvent supérieur à celui du neuf, alors même que sa durée de vie estimée est plus courte. Face à cette équation défavorable, les entreprises préfèrent surinvestir dans du matériel neuf qu’elles espèrent conserver plus longtemps, plutôt que d’opter pour du matériel remis à neuf dont l’obsolescence pourrait être plus rapide. Cette situation révèle le manque de maturité des filières de gestion de fin de vie et du marché du reconditionné, qui peinent encore à convaincre par leur modèle économique. Plus largement, cela démontre qu’un équilibre viable entre coûts, durabilité et performance reste à trouver pour ancrer ces pratiques dans une logique environnementale.

Les résultats du Baromètre Green IT 2025 montrent que l’adoption du matériel reconditionné reste marginale dans de nombreuses catégories d’équipements. Si 27 % des organisations utilisent des téléphones portables reconditionnés, seuls 10 % en font de même pour les écrans d’ordinateurs et autres affichages.
Quand on sait que ces derniers figurent parmi les équipements les plus gourmands en ressources lors de leur fabrication, leur faible taux de réemploi souligne un véritable manque d’optimisation en matière de sobriété numérique.

Vers un équilibre entre innovation et sobriété numérique

Enfin, le Baromètre Green IT 2025 met en lumière la nécessité de concilier innovation technologique et sobriété numérique. Les nouvelles obligations réglementaires, telles que la directive CSRD et la loi REEN, pourraient inciter davantage d’entreprises à intensifier leurs efforts en matière de durabilité numérique. Toutefois, pour que cette transformation soit véritablement effective, il est essentiel que les entreprises dépassent le simple stade de la sensibilisation pour mettre en place des actions concrètes et durables.


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