Gouvernance
À chaque entreprise sa façon de voir le cloud
Par Stéphane Demazure, publié le 25 juin 2014
Bill Veghte
Vice-président et directeur général de l’entité Enterprise de HP
Considéré comme le candidat le plus sérieux à la succession de Meg Whitman, Bill Veghte est à la tête de la division Enterprise, qui génère plus d’un quart des revenus du constructeur et regroupe les serveurs, le stockage, les équipements réseaux, les services technologiques et les activités cloud.
Comment doit évoluer l’offre d’un constructeur tel que HP pour répondre au changement de paradigme actuel de l’informatique ?
Bill Veghte : Les technologies de l’information évoluent très vite et nous observons l’émergence de nouvelles pratiques sous la poussée du cloud computing, de la mobilité, du Big data et des réseaux sociaux. Tout cela va conduire les entreprises et même, plus globalement, toutes les organisations à consommer plus de puissance machine, plus de capacité de stockage, plus de bande passante. Cela nécessite encore plus d’innovation de notre part, sous une forme matérielle et logicielle, de sorte que nous puissions fournir les technologies adéquates, tout en en abaissant le coût pour les utilisateurs. C’est valable aussi bien sur le segment des entreprises utilisatrices que sur celui des fournisseurs de services.
Nous nous attachons également à proposer nos off res sous la forme de services technologiques car, de plus en plus, nos clients ne souhaitent pas seulement pouvoir disposer d’un système de stockage sophistiqué ou d’un serveur optimisé pour faire tourner la base de données Hana de SAP : ils veulent surtout être sûrs qu’ils seront en mesure de délivrer la fonction ou le service correspondant à leurs utilisateurs dans les temps voulus. C’est une autre approche.
Votre activité repose en très grande partie sur votre réseau de partenaires. Comment se traduit votre stratégie d’innovation à leur niveau ?
BV : Nous avons des milliers de partenaires et chacun est positionné de manière unique pour servir nos clients, que ce soit de manière locale ou verticale. Pour cela, nous partageons avec eux notre propriété intellectuelle et nos innovations. De telle sorte que, dans un endroit particulier en France, il y a un partenaire qui saura prendre notre innovation en stockage, réseau ou puissance de traitement pour la traduire en bénéfices pour le client, qu’il s’agisse de mieux gérer le système d’information de ses agences ou de mettre en place une stratégie de déploiement de systèmes de mobilité.
Les entreprises veulent pour la plupart pouvoir s’en remettre à des partenaires en qui elles ont confi ance, qui sont proches d’elles et qui auront au préalable testé et comparé les technologies : elles n’ont plus le temps et les ressources pour le faire elles-mêmes.
Privé, public, hybride : comment analysez-vous les besoins des entreprises en matière de cloud computing ?
BV : Nous définissons le cloud comme un moyen de fournir des résultats à l’aide des technologies de l’information – par opposition au fait d’acheter un produit, de le confi gurer et de l’utiliser pour fournir ces résultats –, en mode self-service et multi-tenant. Ce cloud peut-être implémenté de manière privée, avec des infrastructures acquises en propre, hébergées en interne ou chez un partenaire, ou de manière publique. En pratique, un grand nombre de clients souhaitent un cloud privé, consistant en un datacenter interne avec des serveurs virtualisés. Et ils attendent pour cela, autant que possible, une solution clé en main. D’autres préfèrent un cloud managé par des professionnels qui vont s’en occuper et l’optimiser. D’autres, enfi n, se tournent vers le cloud public, parce qu’ils n’ont pas de contraintes sur la localisation de l’hébergement de leurs données, parce qu’ils sont prêts à partager des systèmes multi-tenant avec d’autres entreprises. C’est un monde à trois faces, dans lequel les entreprises évoluent. Si nous prenons l’exemple des start-up, le chemin le plus probable est de commencer par le cloud public et de passer ensuite au cloud privé, éventuellement managé.
Les critères de choix entre ces différentes formes de cloud sont-ils principalement de nature financière ?
BV : Au-delà de la question « location versus achat » qui doit être finement analysée sur le long terme lorsque vous envisagez de recourir à des infrastructures en cloud, d’autres aspects doivent être pris en compte. Quand vous êtes dans le cloud public, une grande partie de vos coûts est liée à la bande passante nécessaire, parce que vous échangez de plus en plus de données.
Alors que vous pensez essentiellement payer au nombre de machines virtuelles utilisées, vous payez au final beaucoup plus cher. Ce qui amène certains de nos clients à préférer une solution de cloud onpremise plutôt que le cloud public. C’est ce que m’ont dit quatre de nos grands clients que j’ai rencontrés récemment. Toutefois, cela dépend largement des charges applicatives et des circonstances.
Avoir un cloud privé, éventuellement managé, donne aussi plus de contrôle sur les données. C’est un point fondamental pour les entreprises qui ont des contraintes au niveau de l’hébergement de leurs données ou qui veulent mettre en place des processus particuliers pour les sécuriser.
De fait, avec l’avènement de la virtualisation et du cloud, comment les besoins des entreprises en termes d’infrastructures serveurs ont-ils évolué ?
BV : Certains clients nous demandent de l’entrée de gamme, en quelque sorte consommable : « vous l’achetez, vous l’utilisez, vous le jetez… ». D’autres nous demandent en revanche du très haut de gamme, avec des hautes performances, parce qu’ils veulent héberger des applications critiques, avec des charges de travail très spécifi ques. C’est le cas par exemple de certains fournisseurs de services en Saas, qui ont besoin d’une très grande fi abilité et de caractéristiques de haute disponibilité, ou qui considèrent que la meilleure confi guration est d’avoir un système optimisé pour un certain type de charge de travail. Mais le système ne fait pas tout. Il assure la haute disponibilité. Mais la fi abilité et les performances dépendent en grande partie des applications. C’est un point auquel les entreprises doivent porter attention.
Propos recueillis par Pierre Landry