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Adobe Max 2024 : l’IA au cœur des processus créatifs
Par Laurent Delattre, publié le 17 octobre 2024
Entre fascination et crainte, la conférence Adobe Max 2024 a consacré l’IA comme l’axe central du développement des logiciels d’Adobe. De Photoshop à Premiere, la multiplication des outils génératifs transforme le processus créatif, questionnant la place des professionnels face à ces technologies émergentes. Voici ce que les DSI doivent en retenir…
Les conférences informatiques s’enchaînent avec un peu toujours les mêmes discours focalisés sur l’IA. Et bien évidemment, Adobe fait comme tous les autres. Alors, oui, bien sûr, l’IA est en train de totalement métamorphoser la chaîne de création, développement et gestion des contenus multimédias. Comme elle le fait avec la chaîne de création des logiciels et applications. Comme elle le fait avec la chaîne de sécurisation des infrastructures informatiques. Et oui, bien sûr, tout reste encore à inventer et à réinventer, comme l’a magistralement démontré Adobe qui compte bien profiter de l’occasion pour accroître sa main mise sur la chaîne de production média et ne pas laisser de jeunes pousses lui voler la vedette. Tout comme son Adobe Summit en début d’année, l’Adobe Max de cette semaine aura mis une fois de plus l’IA en vedette…
… Jusqu’à en saturer son audience ? Dans les allées, nombreux étaient les créatifs et responsables de productions de contenus à regretter que cette Adobe Max « ne soit plus une conférence autour du Design mais une conférence IA ».
Car Adobe Max 2024 n’a pas été la grande messe Photoshop, InDesign, Illustrator et Premiere qu’elle a toujours été. Non, ce Max 2024 a été, plus encore que l’an dernier, une grande messe « Firefly », la suite d’IA génératives développées en interne par Adobe. Au point que certains créatifs ont commencé à se demander si la conférence 2025 aurait encore besoin de leur présence. Car tous les beaux discours d’Adobe (« nos outils sont conçus pour aider les créatifs, qui sont nos utilisateurs, non pour les remplacer ») ne suffisent pas à effacer la grande crainte qui émerge de cette omniprésence de l’IA : aura-t-on toujours besoin d’autant de photographes, vidéastes, monteurs, scénaristes, designers, voix, doubleurs, et autres petites mains du multimédia dans un avenir proche ?
Parallèlement, les critiques commencent à pleuvoir. Pour beaucoup, l’IA Firefly est encore très loin de tenir ses promesses. Au quotidien, les résultats obtenus sont décevants. Certains reprochent déjà à Adobe de perdre bien trop de temps sur ses IA génératives « alors qu’elles ne savent grosso modo bien réaliser que l’extension d’un fond ou d’un paysage ». « Dès qu’on lui demande d’ajouter quelque chose ou créer quelque chose, les résultats sont dramatiques » nous expliquait un graphiste Photoshop. Certains estiment qu’Adobe devrait bien plus investir dans des IA pour enfin efficacement débruiter, déflouter ou agrandir sans pixélisation les images plutôt que des IA faisant beaucoup moins bien ce qu’ils font eux-mêmes, à savoir créer.
Au-delà de ce sentiment mêlant magie, déception et crainte, voici ce que les DSI doivent retenir cet Adobe Max 2024…
Firefly Video pour générer des vidéos ou améliorer des séquences
Le logiciel d’édition vidéo « Premiere Pro » s’enrichit de nouvelles capacités IA à commencer par l’intégration du nouveau modèle « Firefly Video ». Celui-ci anime trois nouvelles fonctionnalités :
* Generative Extend simplifie et enrichit le montage en permettant aux créatifs de produire de nouvelles séquences vidéo et audio de 2 secondes afin de prolonger des séquences existantes, d’adoucir des transitions ou de maintenir un plan plus longtemps.
* Text-To-Video permet de générer des séquences (jusqu’à 5 secondes) à partir d’une description textuelle qui précise la scène mais aussi l’atmosphère, les mouvements de caméra, le rendu visuel, etc.
* Image-To-Video est une extension de la fonctionnalité précédente sauf que la génération ne s’appuie pas uniquement sur une description textuelle mais également sur une image fixe qui sert d’exemple visuel au modèle générateur.
Ces fonctionnalités sont disponibles en Bêta mais nécessitent préalablement un enregistrement sur une liste d’attente.
Adobe affirme que ses modèles ont été exclusivement entraînés avec des contenus dont il a acquis les droits et des contenus en open source. Selon Adobe, cela garantit aux entreprises une IA éthique et sans risque de violation de copyright, autrement dit une IA « sûre » pour les usages commerciaux des entreprises.
Photoshop multiplie les outils IA
Dans sa nouvelle mise à jour, Photoshop enrichit considérablement son arsenal d’outils génératifs. La fonctionnalité de remplissage génératif, qui permet de compléter des images dont on modifie le cadrage ou de remplir des espaces à l’aide d’une description textuelle, sort de sa phase bêta pour être officiellement en « disponibilité générale ».
De même l’outil de suppression d’éléments indésirables gagne en précision, facilitant l’élimination des éléments perturbateurs indésirables dans les photos. Mieux encore, la fonctionnalité peut désormais automatiquement détecter les « éléments perturbateurs » (comme les piliers électriques et les fils téléphoniques) sur une photo et les supprimer.
Mais la grande nouveauté est l’introduction d’un nouvel espace de travail génératif – pour l’instant en bêta – qui procure aux créatifs un environnement propice à l’idéation et au brainstorming, avec notamment un mode de génération IA rapide.
Dans un tout autre domaine, la visionneuse Substance 3D s’intègre à Photoshop en bêta, simplifiant l’édition d’éléments 3D au sein de designs 2D.
Project Perfect Blend est une future fonctionnalité de Photoshop assez spectaculaire. Il n’est jamais simple de coller dans une photo existante une personne ou un objet provenant d’une autre photo. L’éclairage et l’ambiance ne sont pas les mêmes, ce qui demande beaucoup de travail d’ajustement et de retouche. Avec Project Blend, tout ce travail d’ajustement est réalisé en un clic par l’IA.
Frame.io passe en V4
Adobe Frame.io est une plateforme de collaboration vidéo et photo basée sur le cloud, qui permet aux équipes de partager, organiser et commenter des médias en temps réel. Elle est intégrée à Adobe Creative Cloud et offre des fonctionnalités telles que le suivi des révisions, les transferts de fichiers accélérés, et la gestion des projets créatifs.
Frame.io V4 a été lancée à l’occasion d’Adobe MAX 2024. Cette mise à jour majeure apporte plusieurs améliorations, notamment une nouvelle fonctionnalité appelée Camera to Cloud (C2C), qui permet le téléchargement immédiat des médias directement depuis les caméras vers le cloud. Frame.io V4 inclut également un nouveau modèle de métadonnées, des collections pour organiser les fichiers, et des intégrations avec des caméras Canon, Nikon et Leica.
Des « projets IA » à n’en plus finir
Comme chaque année, Adobe a levé le voile sur des fonctionnalités en cours de développement qui viendront ultérieurement s’intégrer à la suite créative.
Projet Neo est une application web dévoilée l’an dernier qui vise à faciliter le travail et l’édition de designs 3D pour les concepteurs et illustrateurs (elle pourrait à terme intégrer Illustrator). Elle intègre de l’IA qui convertit automatiquement des images 2D en univers 3D puis permet d’ajouter éclairage et ombrage.
Dans un même état d’esprit, Project Turntable permet de prendre un objet vectoriel 2D sous Illustrator puis de le transformer en objet 3D que l’on peut alors réorienter en 3D dans la scène vectorielle Illustrator.
Project Clean Machine est une évolution des fonctionnalités de nettoyage introduites dans Photoshop mais applicables aussi bien aux images fixes qu’aux vidéos. Cette technologie de nettoyage destinée à intégrer Premiere (mais aussi Photoshop) permet de supprimer des éclairs de flash, des défauts visuels, des effets de lumière indésirables, des objets qui obstruent l’image, et autres distractions visuelles indésirables.
Project Scenic est un nouvel outil de création d’images 2D grâce à l’IA : il vous permet de construire une scène 3D à l’aide de plusieurs prompts IA puis de générer un rendu réaliste. Vous contrôlez la caméra et ajustez les objets individuellement en guidant ainsi le processus de génération d’image. Une fonction de “prompts régionaux” vous permet d’apporter des modifications spécifiques aux différents objets dans vos images.
Project Super Sonic est un outil IA pour ajouter des effets sonores aux vidéos. Il permet de générer des sons par des instructions textuelles (des prompts) ou tout simplement en cliquant sur les objets présents dans la vidéo. Les utilisateurs peuvent contrôler le timing, superposer des sons, et choisir parmi différentes variations. L’outil simplifie la création des bruitages mais aussi d’une bande-son personnalisée afin d’offrir à vos vidéos un environnement sonore parfaitement adapté.
Enfin, Project How-To est un nouvel outil de traçabilité qui permet de s’assurer de la provenance des contenus numériques. Combinant différentes techniques de marquage, l’outil permet de retrouver l’origine d’un contenu numérique même si les métadonnées visibles ont été supprimées. L’idée est notamment de pouvoir toujours authentifier un contenu généré par l’IA mais également de conserver les copyrights d’une œuvre même retouchée, voire transférée dans l’univers physique (par impression par exemple).
Bref de l’IA, encore de l’IA et toujours un peu plus d’IA… Finalement, cette Adobe Max n’a heureusement pas démontré que l’IA pouvait remplacer les créatifs (le rêve de bien des patrons marketing ?) mais que l’IA pouvait simplifier leur travail notamment les tâches les plus chronophages. Mais cette édition a aussi démontré que l’IA pouvait ouvrir l’utilisation des outils Adobe à d’autres profils bien moins créatifs et surtout bien moins compétents. On n’a pas fini de voir l’IA transformer les métiers et les outils de la création multimédia.
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