Assurance Qualité, la face cachée de l’agilité et de la réactivité

Gouvernance

Assurance Qualité, la face cachée de l’agilité et de la réactivité  

Par Marie Varandat, publié le 26 octobre 2022

À l’heure où tout s’accélère et où le monde est incertain, les entreprises ont plus que jamais besoin d’intégrer l’assurance qualité à leurs processus de développement et de déploiement, faute de quoi elles peuvent perdre tous les avantages des investissements réalisés ces dernières années pour gagner en flexibilité et accélérer leur transformation.

Secouées par la pandémie, les entreprises ont dû réagir dans l’urgence et adapter leurs modes opératoires ainsi que leurs outils et infrastructures. Mais ce n’était que le début d’une période de grands bouleversements si l’on en croit le dernier rapport « World Quality Report » réalisé par Capgemini et Sogeti, en partenariat avec Micro Focus.

Instabilité géopolitique, rupture des chaînes d’approvisionnement, grave pénurie de ressources dans presque tous les domaines, spirale des taux d’inflation mondiaux, récession économique potentielle, persistance des problèmes environnementaux et sociaux… Partout dans le monde, les entreprises doivent redoubler d’efforts pour rester performantes et réactives au changement, en se concentrant plus que jamais sur la valeur apportée aux clients. Ce sont du moins les conclusions de ce rapport qui a analysé les réponses de plus de 1 750 cadres et professionnels dans 32 pays et 10 secteurs industriels. Pour l’essentiel, les personnes interrogées étaient des dirigeants et des responsables des tests Assurance Qualité (AQ).

Multiplication des enjeux

Parmi les efforts à déployer, l’assurance qualité devient prioritaire : rien ne sert de développer rapidement si c’est pour offrir des bugs aux collaborateurs et des services inutiles aux clients. Longtemps cantonnée à de simples tests, cette assurance qualité évolue au fur et à mesure que les enjeux se multiplient. Ainsi, l’expérience utilisateur, qu’il soit un collaborateur ou un client, constitue toujours une des priorités des stratégies d’assurance qualité. Mais au cours de son 14ème rapport annuel sur le sujet, Capgemini a aussi noté l’émergence de nouvelles motivations. Ainsi, 90% des personnes interrogées estiment que l’absence de stratégie qualité entraine un surcout en déploiement de solutions techniques tandis que 88% pensent qu’elle peut provoquer des pertes de parts de marché au profit d’un concurrent.

Quasiment la totalité des répondants (96%) estiment qu’ils seraient plus vulnérables aux attaques sans stratégie qualité, notamment pour tous les déploiements s’appuyant sur de nouvelles technologies, citant notamment la blockchain et le Web 3.0.

Enfin, nouvel enjeu révélé par le rapport, plus des deux tiers (72%) indiquent que la qualité peut contribuer à l’optimisation de leur stratégie de développement durable avec une informatique plus responsable. Un point d’autant plus important que les personnes interrogées sont convaincues de l’impact du Green IT sur la relation client : amélioration de l’image de marque (pour 46%) et de la fidélité (pour 46%).

Évolution des pratiques qualité

Au fur et à mesure que la prise de conscience grandit et que les enjeux se multiplient, « la fonction d’assurance qualité se transforme à grande vitesse, passant du simple test à de véritables pratiques d’ingénierie de la qualité », stipule l’étude.

De fait, pour faire face à un monde incertain, le changement continu devient la norme pour les entreprises. Autrement dit, elles vont plus que jamais chercher à accélérer leur transformation en s’appuyant sur les méthodes reconnues pour leur efficacité : Agile et DevOps. Dans cette course à la vitesse et à la flexibilité, elles ne doivent toutefois pas oublier qu’il ne peut y avoir de performance économique ou de satisfaction client sans produit adapté aux besoins du marché et services performants. Et c’est précisément parce qu’elles en sont conscientes qu’elles sont de plus en plus nombreuses à intégrer une démarche qualité dans leur stratégie à toutes les étapes de la création d’un produit ou service.

Résultat, de plus en plus d’organisations gonflent leurs équipes Agiles et DevOps avec des ingénieurs qualité. Dans certaines entreprises, la fonction qualité prend même le lead des équipes en charge du développement et du déploiement.

Taux de présence des ingénieurs qualité dans les équipes “Agile”

Deux principaux freins à l’intégration de l’Assurance Qualité

Toutefois, il semblerait que face aux logiciels du marché (ERP, CRM, etc.), beaucoup d’entreprises peinent à mettre en place une stratégie qualité efficace, faute de pouvoir décomposer les flux de ces solutions packagées afin de les intégrer dans une démarche qualité couvrant l’intégralité d’un service.

Autre difficulté, le provisionnement de données pour réaliser les tests d’assurance qualité reste très artisanal.
Seulement 20% des entreprises auraient une démarche globale opérationnelle, 31% prévoient de le faire mais rencontrent des difficultés à la mettre en œuvre et 41% des entreprises continuent à fournir des données au fil de l’eau, en fonction des besoins des projets. Ce point d’achoppement est d’autant plus critique que les entreprises doivent prendre en compte les réglementations (RGPD) et la sécurité avant de pouvoir fournir un jeu de données pour un test. Dès lors, avoir une démarche globale avec des jeux de données prêts à l’emploi permet d’éviter aux équipes Agile et DevOps de perdre un temps précieux alors qu’elles se donnent tant de mal à accélérer les projets.

Une France pionnière mais désorganisée

Une fois n’est pas coutume, la France n’est pas en retard sur cette évolution des pratiques “Qualité”. L’étude mentionne même un certain enthousiasme dans les secteurs de la finance, de l’industrie manufacturière, de l’énergie et dans le secteur public pour l’innovation et des « outils intelligents » d’ingénierie de qualité. Principale motivation : l’expérience utilisateur et la réactivité. Comme dans les autres pays, les organisations françaises cherchent également à concevoir des solutions plus écoresponsables en s’appuyant sur les pratiques d’ingénierie de la qualité pour les aider. Dans le même registre, l’étude mentionne également l’inclusion, priorité absolue en France dans le secteur public et pour toutes les entreprises dont le chiffre d’affaires est égal ou supérieur à 250 millions d’euros, notamment à cause de la loi européenne sur l’accessibilité (EAA).

Malgré l’appétence des entreprises françaises pour de nouvelles pratiques et outils d’Assurance Qualité, le côté organisation reste un peu à la traine. Les ingénieurs qualité ne sont pas encore réellement intégrés aux équipes Agiles. De la même façon, les entreprises n’ont pas établi de cartographie de la chaine de valeur, concept essentiel selon Capgemini visant à définir une trajectoire pour optimiser la valeur des pratiques d’assurance qualité. Enfin, la France est plutôt avancée sur l’intégration des tests qualité aux pipelines CI/CD mais comme les autres pays, elle peine sur l’industrialisation du provisionnement de jeux de données.

Maturité des organisations françaises en matière d’assurance Qualité

« On constate une accélération sans précédent ces dernières années des plateformes numériques et plus globalement de la modernisation des applications. Dans le même temps, les défis de la chaîne d’approvisionnement, les menaces de cybersécurité et la pénurie permanente de compétences font que le paysage des entreprises n’a jamais été aussi complexe. Dès lors, les investissements dans une assurance qualité et une ingénierie solides sont le fondement de la capacité d’une organisation à rester flexible, réactive et adaptable. En regardant de plus près, nous pouvons voir que cette fonction vitale peut avoir un impact tangible sur les performances plus globales de l’entreprise, rentabilité et durabilité comprises ,» conclut Mark Buenen, Global Leader, Quality Engineering and Testing de Capgemini Group.

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