Cloud
Avant celle de l’IA, SAP doit gagner la bataille du Cloud
Par Thierry Derouet, publié le 03 décembre 2024
Sous les lustres du Palais des Congrès de Lille, la 24e édition de la convention USF a réuni plus d’un millier d’utilisateurs SAP. Une question a largement dominé les débats : comment l’éditeur peut-il amener ses clients vers le Cloud et son offre Rise sans les brusquer ?
Le Cloud soulève des enjeux stratégiques majeurs, qu’il s’agisse du coût, de la gestion des compétences ou de la sécurité des données… Gianmaria Perancin, président de l’USF, ne mâche pas ses mots. Car cette année, l’USF, le club des utilisateurs francophones de l’ERP, s’est donné pour mission de « démêler mythes et réalités » autour d’une technologie qui suscite autant d’interrogations que d’espoirs. Les résultats de l’enquête de satisfaction 2024, menée auprès de 134 entreprises et organismes publics, viennent corroborer cette prudence collective.
SAP trop focalisé sur la rentabilité
Bien que la notoriété de l’offre RISE de l’éditeur dans le Cloud ait doublé en un an, passant de 40 % à 70 %, son adoption reste timide : seules deux entreprises sur dix la voient comme un véritable plus pour les métiers, la hausse des coûts constituant l’obstacle principal.
Plus révélateur encore, seulement 20 % des sondés déclarent entretenir une relation de confiance avec SAP, tandis que 40 % jugent l’éditeur trop focalisé sur la rentabilité.
Pourtant, la fidélité envers le géant allemand reste forte : 90 % des entreprises prévoient de maintenir leur collaboration avec SAP, et 40 % envisagent même d’adopter davantage de produits.
Pour renforcer le dialogue entre SAP et ses utilisateurs autour de son offre cloud, l’USF a mis sur pied une commission dédiée à RISE. À sa tête, Sadjia Dahmane admet sans détour que « SAP devra revoir sa manière de commercialiser ses solutions ».
Une nécessité d’autant plus pressante, comme le souligne Bernard Cotineau, également membre de ladite commission, qu’« avec le passage au Cloud, SAP se mue en véritable fournisseur de services, bouleversant ainsi la relation historique avec ses clients ».
Un partenariat avec Bleu pour rassurer
En attendant, l’urgence actuelle pour les utilisateurs de SAP concerne la migration d’ECC 6 vers S/4HANA : 75 % des répondants à l’enquête de l’USF s’y résolvent en raison de la fin de la maintenance des anciennes versions, ce qui a toutes les caractéristiques d’une adoption sous la contrainte.
Une situation qui illustre bien le défi à relever par l’éditeur, qui doit combattre un manque de confiance et un sentiment de mauvaise écoute. SAP tente donc de répondre aux questions du moment, par exemple concernant la souveraineté des données dans le Cloud : il vient d’annoncer un partenariat avec Bleu (Orange/Microsoft) pour une offre cloud conforme au référentiel SecNumCloud 3.2 de l’Anssi.
Ce retour de la confiance est une véritable nécessité, alors que se profilent de nouveaux challenges liés à l’introduction de l’IA générative : bien que prometteuse, cette technologie a besoin de sérénité pour s’imposer. C’est l’enjeu des prochains mois.
3 QUESTIONS À Gianmaria Perancin, président de l’USF
Le Cloud est-il vraiment le seul chemin vers l’innovation ?
L’éditeur nous dit : « Le Cloud, tout de suite ». Nous, on répond : « Peut-être demain ». Le passage au Cloud doit être un choix réfléchi, pas subi et obligatoire. Les entreprises du parc installé ont leurs propres contraintes à prendre en compte, qu’elles soient technologiques, opérationnelles ou budgétaires.
La difficulté vient-elle surtout du manque de compétences ?
Le cabinet IDC, dans une étude de mai dernier, pointe une pénurie d’expertises IT qui affectera neuf entreprises sur dix d’ici 2026. Or la transition vers le Cloud nécessite des compétences spécifiques dans le domaine de l’urbanisme IT, de la gestion des licences, ou du développement. Il est impératif d’investir dans la formation à tous les niveaux et chez tous les acteurs : clients, partenaires, éditeurs.
La souveraineté des données dans le Cloud est-elle un sujet de préoccupation ?
Protéger les données stratégiques et personnelles est une priorité. Pourtant, de nombreuses questions demeurent : Où sont stockées nos données ? Qui y a accès ? Sont-elles correctement chiffrées ? Sommes-nous en conformité avec le RGPD ? Nous allons avoir besoin d’une vigilance juridique accrue et de l’appui des régulateurs comme la Cnil pour garantir la sécurité de notre patrimoine informationnel.
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