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La ville 2.0 selon l’architecte italien Carlo Ratti
Par La rédaction, publié le 27 juin 2013
Carlo Ratti, responsable du MIT Senseable City Lab, a présenté à l’USI 2013 sa vision du développement de la ville intelligente. Des transports à l’énergie en passant par l’engagement civique, les innovations à venir influenceront tous les aspects de la vie urbaine.
En 1995, l’écrivain George Gilder annonçait qu’en raison de la croissance continue des réseaux de télécommunication et du personnal computing, nous nous dirigions vers la mort des villes, qui ne seraient plus que les bagages abandonnés de l’ère industrielle. Carlo Ratti lui donne tort en expliquant que ces villes n’ont jamais autant prospéré qu’au cours des deux dernières décennies. Depuis 2008, et pour la première fois dans l’histoire, plus de la moitié de la population mondiale vit dans les zones urbaines.
Épine dorsale des futures « smart cities » ou villes intelligentes, les technologies numériques vont bouleverser la vie urbaine comme elles l’ont fait dans un autre domaine, celui de la Formule 1. Jusqu’à il y a quelques années, le succès d’une écurie dépendait uniquement de la mécanique et les capacités du pilote. Désormais, le facteur numérique a pris une place prépondérante, en transformant la voiture en ordinateur, avec un suivi en temps réel par des milliers de capteurs. De la même façon, ces technologies vont provoquer une mutation des espaces urbains, qui deviendront des « villes sensibles », selon Carlo Ratti.
Forte participation civique et faible pollution
Les acteurs majeurs de ces mutations seront les citoyens, qui grâce à la multiplication des appareils mobiles connectés, l’amélioration de la couverture sans fil et le développement des réseaux sociaux, prendront collectivement les décisions concernant la cité tout en signalant instantanément tout problème ou anomalie sur la voie publique.
Le développement des smartphones et leurs capacités amèneront progressivement à la disparition d’une grande partie des documents papier et des portefeuilles. Chaque réservation ou paiement pouvant se faire directement depuis son terminal personnel depuis l’avènement des puces NFC. Le mobile servira également à la collecte de données afin d’améliorer la vie urbaine.
Ce big data permettra à la ville de communiquer sur le suivi des déchets et le trafic, qui sera optimisé de façon à rester fluide, dans la fréquentation des transports en commun comme pour la circulation des véhicules individuels. Cela sera rendu possible grâce aux voitures connectés et a certaines applications telles que Tranquilien, lauréate du dernier concours dataconnexions.
Lessmart cities seront aussi plus écologiques grâce à l’optimisation du trafic, mais aussi grâce au « local warming », un système de détecteurs de présence très précis permettant à des diffuseurs de chauffer ou refroidir l’air juste au niveau de la personne, sans avoir à chauffer ou climatiser tout un bâtiment. Cet aspect « responsif » de la température de l’air sera également valable pour les espaces publics, qui s’« optimiseront » instantanément et de façon autonome en fonction du nombre de personnes présentes.
Changements infrastructurels
Carlo Ratti (photo) explique que des changements majeurs se feront aussi au niveau du système éducatif, car les connaissances seront accessibles à tous depuis n’importe où. La façon de travailler des étudiants va évoluer, ils passeront d’un travail sédentaire, rivés à leur table, à un système de cours accessible depuis partout. Ils pourront ainsi, grâce à la mobilité des appareils connectés, travailler ailleurs que dans une salle de cours.
Ce mélange entre l’espace de travail et l’espace de vie ne s’étendra pas qu’aux étudiants, mais à quasiment tous les actifs, qui pourront travailler depuis chez eux. Ce phénomène de virtualisation de l’entreprise commence déjà à voir le jour avec le cloud et le développement du télétravail. Cette fusion entre lieux de vie et lde travail aura également un aspect bénéfique sur l’environnement en supprimant en grande partie le trafic lié aux déplacements professionnels.
Enfin, l’architecte italien prophétise un retour des usines dans les villes, grâce à l’imprimante 3D qui, en se miniaturisant, permettra de réintroduire les moyens de production directement en milieu urbain.
Cette vision quasi utopique de la vie en milieu urbain ne se concrétisera qu’au prix d’une politique d’ouverture des gouvernements qui devront déléguer une partie du pouvoir aux citoyens. Ces gouvernements devront être moins sensibles aux arguments des lobbys industriels freinant le développement des énergies renouvelables. La neutralité du réseau devra, enfin, être préservée sous peine de voir les villes intelligentes plus proches de la dystopie de George Orwell que de la vision de Carlo Ratti.