Green IT
Le gaspillage d’électricité dans les datacenters n’est pas une fatalité
Par La rédaction, publié le 12 janvier 2016
Yann Le Borgne, directeur France de Pure Storage
L’informatique grand public, les réseaux sociaux, les jeux, la messagerie électronique, les smartphones équipés de caméras, etc. ont suscité l’apparition de ce qu’on a surnommé le « pot d’échappement numérique » de l’économie mondiale.
Non seulement les utilisateurs créent un volume croissant de données, mais ils sont de plus en plus nombreux. Les Nations Unies estiment que la population mondiale a doublé, passant de quatre à huit milliards d’habitants depuis les années 60, et qu’elle devrait encore doubler dans le même laps de temps. Gartner estime que sept milliards de smartphones seront vendus entre 2013 et 2017. En bref : nous allons créer encore plus de données et consommer plus d’électricité pour les produire, les stocker et les traiter dans des centres informatiques.
L’IMPACT ÉCOLOGIQUE
De quelle quantité d’énergie s’agit-il ? Plus que vous le pensez. Selon certaines sources datant de fin 2012, 9 % de la consommation électrique française serait consommée par les datacenters ! Difficile de dire si ce chiffre est fiable, toujours est-il qu’un datacenter consomme en moyenne la même quantité d’énergie qu’une ville de 40 000 habitants. Sachant qu’on estime à 130 le nombre de ces grands centres d’hébergement de données en France, cela représente la consommation électrique de la moitié de la population du grand Paris, ce qui est tout à fait impressionnant.
L’AGENDA ÉCOLO
Les datacenters consomment, directement ou non, des carburants d’origine fossile dégageant des gaz à effet de serre. Ils dégagent également de la chaleur, polluant secondaire qu’il convient d’extraire et de gérer. Dans la conception des datacenters, la priorité a changé. Elle est passée de la proximité avec les consommateurs à la facilité d’accès à de l’air et à de l’eau froids pour refroidir les installations et évacuer l’excédent de chaleur de manière responsable. Notre consommation d’énergie dans le travail et les loisirs suscite une attention croissante. La combinaison de soulèvements politiques partout dans le monde, des récentes catastrophes naturelles et des pénuries à venir éveille les consciences quant à la nécessité de maîtriser la consommation et d’améliorer l’efficacité énergétique, depuis les voitures jusqu’aux datacenters.
La question de la responsabilité des entreprises résulte en partie de l’échec du protocole de Kyoto visant à établir un plan de lutte contre la pollution, de réduction des rejets de CO2 et contre les fluctuations de la température mondiale. Les exigences des grandes entreprises dans des domaines essentiels, tels que la recherche de produits éthiques, la réduction de l’empreinte carbone et la préservation des carburants d’origine fossile, sont le fait de directions et d’actionnaires prévoyants plutôt que d’une action intergouvernementale, qui brille par son inexistence.
L’IMPÉRATIF DU CHANGEMENT
Tout cela nous ramène au datacenter, à la manière dont nous l’utilisons, en tant qu’entreprises, et à ce qui change. Manquant d’espace et confronté à des factures d’énergie constamment en hausse, l’exploitant type du datacenter réduit déjà les coûts tout en préservant les performances. Pour ce faire, il a recours à des générateurs et à des systèmes de refroidissement plus performants en optant pour des serveurs et des commutateurs réseau plus efficaces. La virtualisation offre d’énormes avantages. L’un des principaux réside dans le fait qu’il n’est plus nécessaire de disposer d’une grande quantité de matériel pour garantir la disponibilité.
Les remarquables économies réalisées ces cinq dernières années en termes d’efficacité énergétique ont absorbé l’augmentation de la consommation électrique des centres informatiques. Cependant, quand on sait que les datacenters les plus évolués du monde disposent aujourd’hui d’une marge ne dépassant pas 7 % pour le refroidissement, il n’est guère possible d’envisager des améliorations. Certes, il existe des datacenters moins modernes, dont la marge de manœuvre en termes de refroidissement va de 70 à 100 %. Cependant, le coût de remédiation est si prohibitif qu’il est généralement plus économique de les reconstruire de toutes pièces. Dans un cas comme dans l’autre, une amélioration immédiate est extrêmement peu probable.
Ce qui continue de consommer de l’énergie et de produire une grande quantité de chaleur, ce sont les pièces mobiles qui se trouvent à l’extrémité de la chaîne informatique. Elles consomment généralement 30 à 50 % de l’électricité et de l’espace physique d’un centre informatique. Il s’agit des disques durs.
LE GRAND BOND EN AVANT
Aujourd’hui, les baies de stockage flash les plus évoluées offrent la même capacité exploitable que les disques durs, mais avec un gain de performance de 1 000 % et une consommation de seulement 10 % de l’énergie. D’après nos calculs, les réductions de coût de consommation et de refroidissement obtenues en passant d’un système à disques à une baie de stockage flash avancée de 11 To (au coût actuel de l’énergie aux États-Unis) représentent quelque 200 000 $ (environ 180 000 €) sur 5 ans. Nous sommes rejoints dans notre analyse par Forrester qui a constaté des économies de l’ordre de 86 000 $ (environ 78 000 €) sur la consommation et le refroidissement pour une seule baie et sur une période de trois ans. Au passage, il convient de noter que cette étude a porté uniquement sur un poste mineur en termes d’économies. Celles qui peuvent être réalisées sur les logiciels, le déploiement et l’espace requis dans les racks ne sont pas négligeables non plus.
La capacité récupérée évite par ailleurs aux responsables des services informatiques de perdre leur temps à jouer à Tetris avec les dalles du plancher de leur datacenter. Chaque rack remplacé par une baie flash permet d’ajouter et d’exploiter au moins 30 serveurs physiques, ou bien d’économiser autant d’espace et d’énergie.
Quand on parle d’écologie, on peint souvent un futur glorieux que certaines technologies miracles non encore découvertes vont apporter. Peut-être serait-il bon de s’intéresser à celles qui existent déjà et commencer la transition dès maintenant ?