Gouvernance
Les DSI prônent un numérique plus responsable à l’occasion des élections européennes
Par Laurent Delattre, publié le 07 mars 2024
Le Cigref et ses équivalents en Belgique, aux Pays-Bas et en Allemagne, publient un manifeste pour un avenir numérique durable, responsable et de confiance alors que 427 millions d’européens sont appelés à voter dans les prochaines semaines…
En juin 2024, les Européens seront appelés à élire leurs représentants au Parlement européen. Comme le rappelle le site du gouvernement, « cette assemblée façonne notre vie quotidienne bien plus qu’il n’y paraît ». Et si bien des électeurs français y voient plus un moyen d’influer sur la politique nationale, le Cigref français, le Beltug belge, le CIO néerlandais et le Voice allemand ont bien conscience des enjeux qui se jouent dans ce parlement.
Ensemble, les quatre organisations représentent plus de 1000 grandes entreprises qui utilisent des technologies numériques de plus en plus contrôlées et règlementées par l’Europe à travers du RGPD, du Data Act, du Cyber Act, du DMA ou du DSA entre autres…
Et cette élection est l’occasion pour ces associations de DSI de faire entendre leurs voix auprès des politiques et futurs élus européens. Ils publient ainsi un manifeste commun, titré « Une perspective sur le monde digital de demain », pour mettre en avant 4 priorités clés qui selon eux doivent impérativement être prises en compte pour favoriser le développement d’un numérique durable, responsable et de confiance…
Le document décrit les recommandations et les stratégies nécessaires pour que l’Union européenne renforce sa compétitivité et son leadership en matière de technologie digitale et d’économie des données, tout en assurant une approche durable et équitable.
Les recommandations et stratégies proposées dans le manifeste visent principalement à renforcer l’écosystème numérique européen et à garantir une transition numérique durable et équitable.
Le document recommande aux dirigeants européens de :
1. Renforcer le secteur européen des solutions informatiques pour permettre plus de diversité dans les technologies et les fournisseurs. Notamment en établissant des réglementations à l’impact mondial, en intensifiant les initiatives de R&D européennes, et en mettant en place une IPCEI (Important Project of Common European Interest) pour les matières premières critiques afin de préparer stratégiquement et durablement les transitions énergétique et numérique de l’Europe.
2. Faciliter l’adoption des technologies innovantes comme l’IA.
3. Encourager l’émergence et la croissance de nouvelles entreprises européennes, en veillant à ce que les futures « licornes » restent au sein de l’UE, et soutenir une communauté open source pionnière.
4. Mettre en place un système de surveillance rigoureux pour les actifs européens afin de prévenir l’acquisition de firmes stratégiques européennes par des fonds étrangers mais aussi s’assurer d’être en mesure de fournir des alternatives européennes à ces fonds étrangers.
5. Engager l’Europe vers des technologies numériques responsables en proposant de nouvelles réglementations obligeant les fabricants d’équipements informatiques et les fournisseurs de services numériques à publier et à réduire leur impact environnemental. Le document demande également la création d’une norme d’éco-conception pour les logiciels ainsi que d’une norme de mesure multi-critères pour l’empreinte environnementale numérique des organisations.
6. Améliorer la coopération entre les agences réglementaires pertinentes au sein des États membres ainsi qu’entre les États membres pour harmoniser l’efficacité et l’efficience de l’application des réglementations.
7. Développer une réglementation plus souple et plus agile pour accélérer les processus législatifs et de gouvernance en collaborant davantage avec les utilisateurs professionnels.
8. Prendre des mesures pour faciliter les migrations d’un fournisseur à un autre et prévenir les mauvaises pratiques commerciales ou la perpétuation de barrières techniques, organisationnelles ou commerciales par les fournisseurs, notamment dans le domaine des services cloud.
9. Assurer la responsabilité des processeurs de données envers les sujets de données, quelle que soit leur localisation.
10. Tenir les fournisseurs IT responsables de la conformité avec la législation et les normes de l’UE sur toute la chaîne de valeur, y compris la cybersécurité et l’intelligence artificielle.
Les auteurs du rapport prônent, au final, une politique industrielle européenne, ferme et ambitieuse, dans le domaine du numérique, nécessaire pour disposer de solutions alternatives à celles qui dominent actuellement le marché.
On pourra toutefois reprocher à ce manifeste de bien trop tabler sur la régulation pour y arriver et pas assez sur l’incitation et l’encouragement à innover et à oser. Et certains points manquent clairement d’illustration par des mesures très concrètes. D’autant que l’on connaît les travers européens à confondre régulation et protectionnisme et plus encore à négliger tout mécanisme à même d’évaluer l’efficacité des politiques ici recommandées. Sa lecture est néanmoins des plus instructives pour les DSI en quête de vision à long terme pour une informatique durable et équitable…
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