Data / IA
Microsoft « prêt à payer la note » en cas de violation de droits d’auteur par ses IA
Par Laurent Delattre, publié le 08 septembre 2023
Craignant que trop d’entreprises freinent leur adoption de son IA Copilot par peur de dérives et d’éventuelles violations de propriété intellectuelle, Microsoft lance une initiative inédite pour protéger ses clients contre d’éventuelles poursuites juridiques et s’engage à payer la note en cas de condamnation.
Nous sommes revenus à plusieurs reprises dans nos colonnes sur les nouveaux risques pour l’entreprise liés à l’utilisation des IA génératives. L’un d’entre eux, faisant aujourd’hui l’objet de nombreux débats et engendrant plusieurs procédures légales, concerne le respect de la propriété intellectuelle et les éventuelles violations de droits d’auteur. Ce problème est d’autant plus crucial que l’on ignore souvent les contenus qui ont été utilisés, voire copiés, pour entraîner les grands modèles génératifs d’OpenAI, Microsoft ou Google.
Dans le monde des affaires, l’inquiétude n’est jamais bonne. La lutte pour imposer son IA au détriment des autres est devenue une véritable guerre, à la fois stratégique, commerciale et médiatique, entre les grands acteurs de la tech américaine. La compétition pour la meilleure place sur le marché est féroce. Il n’est pas question que de « petites inquiétudes » viennent freiner les entreprises clientes dans leur adoption d’une R&D qui coûte si cher aux éditeurs et à la planète !
Microsoft est ainsi le premier éditeur à proposer une garantie. En termes simples, si une entreprise cliente de Microsoft est poursuivie pour violation de droits d’auteur en raison de l’utilisation de ses services Copilot ou des résultats qu’ils génèrent, Microsoft s’engage à prendre en charge sa défense et à payer toute condamnation résultant d’un verdict défavorable. La seule condition est que les clients aient correctement utilisé et activé les « garde-fous » et les filtres de contenu recommandés par Microsoft.
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Microsoft veut rassurer les clients de ses IA
Brad Smith, président de Microsoft et Hossein Nowbar, CLO de Microsoft, expliquent que ce nouveau programme « Copilot Copyright Commitment » résulte d’une triple constatation : « Tout d’abord, nous sommes convaincus de la nécessité de soutenir nos clients lorsqu’ils utilisent nos produits [et payent pour y accéder]. Ensuite, nous sommes sensibles aux préoccupations des auteurs et nous pensons que c’est à Microsoft, et non à nos clients, qu’il incombe d’y répondre. Enfin, nous avons intégré d’importants garde-fous dans nos IA Copilot afin de respecter les droits d’auteur ».
« Nous sommes sensibles aux préoccupations des auteurs et nous pensons que c’est à Microsoft, et non à nos clients, qu’il incombe de répondre à ces préoccupations »
— Brad Smith, président de Microsoft
Bien évidemment, les deux responsables américains insistent aussi sur les limites de leur engagement. Ils expliquent ainsi que « ce programme est assorti de conditions importantes, car il est possible que notre technologie soit intentionnellement utilisée à mauvais escient pour générer du contenu préjudiciable. Pour se prémunir contre cela, les clients doivent utiliser les filtres de contenu et autres systèmes de sécurité intégrés au produit et ne doivent pas tenter de générer des contenus illicites, notamment en ne fournissant pas d’informations à un service Copilot que le client n’a pas les droits appropriés d’utiliser. »
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Quelles implications pour une DSI ?
Pour les DSI, cette annonce tombe à point nommé, alors que les technologies d’IA de Microsoft s’apprêtent à sortir de leur phase de tests pour se généraliser progressivement à toutes les solutions d’entreprise. Sur le papier, cet engagement de l’éditeur américain réduit considérablement le risque juridique associé à l’adoption de technologies d’IA génératives, permettant ainsi aux entreprises de se concentrer sur l’innovation plutôt que sur les complications légales éventuelles.
Bien évidemment, cette « garantie » de Microsoft ne couvre que les violations de droits d’auteur et non l’intégralité des risques liés à l’usage d’une technologie certes très prometteuse, mais également très immature. De plus, il reste à déterminer quels sont les filtres et autres « garde-fous » concrètement mis en place par Microsoft, et dans quelle mesure ces protections peuvent être volontairement ou surtout involontairement contournées.
Enfin, les responsables de Microsoft ne précisent pas si cette protection est applicable partout, et notamment en Europe. L’éditeur n’ayant pas spécifié « US commercial customers » dans cette annonce, on peut supposer qu’il s’agit bien d’une protection internationale, non limitée aux seules entreprises américaines. Un point essentiel à vérifier.
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