Data / IA
MLOps : L’IA doit basculer dans l’ère industrielle
Par La rédaction, publié le 21 février 2023
Alors que l’IA a commencé à démontrer son ROI sur de multiples cas d’usage, l’heure est maintenant venue de passer à l’échelle. Il faut industrialiser son déploiement et mettre en place une approche de gestion du cycle de vie des IA. Cette approche, baptisée MLOps, reste encore bien trop rare dans les entreprises françaises.
Par Geoffray Gruel, COO d’ippon Technologies
Ces dernières années, les plus grandes entreprises se sont dotées de stratégies digitales ambitieuses et certaines ont mis en place des structures de type data factory. L’objectif était simple : ne pas passer à côté de la révolution de l’intelligence artificielle et d’une manne estimée par PWC à 15,7 trillions de dollars d’ici 2030. Tous les dirigeants des grandes entreprises ont alors nommé un chief data officer et débloqué les moyens de lancer une stratégie data ambitieuse.
Cinq ans après cette phase de « buzz », le bilan est contrasté. D’un côté, l’IA a démontré sa capacité à créer de la valeur et à générer un ROI important dans de nombreux cas d’usage. C’est tout particulièrement vrai dans le secteur bancaire, le commerce ou encore l’industrie. D’un autre côté, la limite de ces premières initiatives réside dans la difficulté des organisations à faire passer ces projets d’une vision très métier et très silotée à une approche beaucoup plus globale et généralisée. Pour changer d’échelle et initier une cross-innovation entre métiers, il faut casser les silos et adopter une approche beaucoup plus globale.
Le potentiel de création de valeur de l’IA en entreprise va bien au-delà des cas d’usage que nous observons aujourd’hui.
MLOps, un modèle pour couvrir l’ensemble du cycle de vie des IA
Ce changement d’ère signifie aller vers une approche totalement intégrée de la production des modèles d’IA, couvrant l’émergence de l’idée de départ au niveau des métiers, la collecte des données, l’élaboration du modèle puis sa mise en production et enfin sa maintenance dans la durée.
Cette industrialisation a un nom, MLOps. L’approche formalise et outille toute la chaîne de fabrication des modèles d’intelligence artificielle et vient automatiser certaines phases pour accélérer les processus.
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Un récent article paru dans MIT Technology Review est consacré à la stratégie MLOps de Capital One. Il montre comment cette banque tire profit de l’automatisation de toutes les tâches répétitives liées aux traitements à apporter aux données puis à la conception des données. Les data engineers et les data scientists ont plus de temps à consacrer à des tâches à haute valeur ajoutée comme, par exemple, interagir avec les experts métiers pour générer de l’innovation.
L’approche MLOps n’est pas totalement nouvelle. Elle s’inspire directement de DevOps, le modèle qui s’est largement imposé ces dernières années dans le monde du développement d’applications. Bien souvent, MLOps n’a été implantée que partiellement. Les entreprises ont investi dans des infrastructures sur la partie data et sur l’élaboration des modèles, mis en place des organisations de gouvernance de la donnée.
Mais rares sont celles à avoir poussé la logique jusqu’à MLOps. Or, c’est précisément quand l’ensemble du cycle de vie du modèle est bouclé que l’entreprise va pouvoir maximiser la valeur de l’approche. Un modèle conçu à l’instant t doit pouvoir évoluer dans le temps, notamment quand de nouvelles données sont disponibles, quand le marché concurrentiel s’est modifié ou quand le comportement des clients a évolué. Boucler ainsi la boucle va permettre d’accompagner ces changements dans la durée et d’adapter les modèles en permanence, d’anticiper le moment où l’IA va commencer à délivrer des résultats aberrants parce que son environnement aura trop évolué.
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Plus qu’une évolution technologique, un changement de culture d’entreprise
En 2023, déployer MLOps ne sera clairement plus un enjeu technologique. Il est maintenant possible de tirer pleinement profit des investissements consentis sur la data et de créer une véritable usine à IA qui va pouvoir produire les modèles de machine learning et les algorithmes de manière rationalisée et pérenne. Le véritable défi est organisationnel.
Passer à l’échelle et aller vers cette industrialisation de l’IA implique de s’appuyer sur les succès engrangés ces dernières années, même s’il s’agissait généralement de projets très spécifiques. Ces premières expériences réussies doivent être les leviers qui mèneront l’entreprise vers une approche beaucoup plus globale et généralisée.
Il faut faire monter en maturité les équipes projets, mais aussi s’appuyer sur ces succès pour diffuser la culture data auprès des métiers. Le rôle de la direction générale et du chief data officer est alors essentiel. Ce d’autant qu’une stratégie IA peut avoir un impact décisif sur la stratégie d’entreprise. L’exemple de Skywise d’Airbus est significatif : il y a dix ans, le constructeur n’avait pas directement accès aux informations liées à l’utilisation de ses avions. Les données restaient au niveau de chaque compagnie aérienne. En misant sur le digital, Airbus a su reprendre la main sur ces données et offrir tout un éventail de services additionnels à ses clients.
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