Opinions
Victoire par KO des magasins sur Internet ?
Par La rédaction, publié le 29 janvier 2013
Depuis quinze ans, tout le monde ne cesse de ressasser qu’internet est et sera partout. Mais en 2013, les magasins physiques prendront leur revanche !
Combien de fois avons-nous entendu dire que les ventes sur internet avaient encore progressé de 25 % ? Humiliés sur la place publique de la distribution française, les magasins physiques auraient été relégués au même rang que la vieille machine à vapeur.
Erreur ! L’année 2012 a démontré avec force que l’essor de l’e-commerce ne traduisait pas un désamour des Français pour les commerces traditionnels. Bien au contraire, les consommateurs s’accrochent à leurs vieilles boutiques et leur demandent de se renouveler en se basant sur ce que le net a apporté.
Cette demande montre bien que les magasins physiques sont irremplaçables en matière d’expérience shopping et les remet au centre de la consommation. Si 2012 a vu internet se mettre à leur service, en 2013, il leur fera allégeance.
Dans les pays où l’e-commerce est plus mature, il ne représente pas forcément un poids plus important : de 7 à 10 % pour les Etats-Unis, le Japon, l’Allemagne, etc. L’Angleterre fait cependant office d’exception au niveau mondial. De plus, dans les dix prochaines années, ce taux ne devrait pas dépasser 15 % dans la plupart de ces pays.
En 2012, les achats sur internet ont vu croître dans leur sillage le fameux web-to-store. Soit la tendance désignant les personnes réalisant des recherches en ligne avant d’acheter en magasin (75 % des internautes). Les freins à l’achat sur le net sont justement à l’origine de son émergence, car le web ne permet pas de finaliser ses achats correctement.
Une autre preuve ? Les fameux pure players, qui ne s’avèrent pas être l’eldorado tant annoncé ! Une bonne partie d’entre eux se sont associés à des réseaux de distribution afin de devenir rentables. C’est le cas notamment de Pixmania ou Cdiscount. La majorité a même ouvert des points de vente.
Quid des réseaux physiques qui ferment leurs portes (Virgin et Surcouf) ? C’est le résultat d’erreurs stratégiques, souvent liées à un positionnement trop proche des produits les plus achetées sur internet. Seules les catégories ne nécessitant pas de toucher et de voir un produit sont concernées : le tourisme, les produits culturels (CD, livres… En dehors d’elles, les magasins n’ont plus rien à craindre. Internet a été maîtrisé.
L’absence de système de tracking fiable, et donc de mesure du retour sur investissement, n’a pas permis d’identifier l’efficacité de chacun de ses dispositifs. Le coupon est généralement perçu comme un procédé altérant la force d’une marque et attirant les chasseurs de primes non fidélisables. Le web-to-store n’a donc pas été adopté massivement. En revanche, la fin 2012 a vuapparaître un nouveau mode de tracking bien plus prometteur.
Pendant ce temps, victime de la concentration du marché autour des grandes chaînes et encore absent sur internet, le commerce de proximité a continué à souffrir. Le commerce en ligne continue d’effrayer ces indépendants, alors que le web-to-store n’a pas clairement encore été identifié.
Cependant, bon nombre d’entre eux ont déjà initié une stratégie d’e-commerce afin d’étendre leur zone de chalandise. Une estimation dénombre d’ores et déjà 5 000 commerçants de proximité sur 150 000 disposant d’un site marchand. Le commerce de proximité adopte avec quelques années de décalage le même mouvement stratégique que les grandes enseignes.
L’adoption a été timide mais l’avenir semble très prometteur : géolocalisation en magasin, catalogues interactifs sur bornes, vitrines interactives, miroirs ou applications de simulation de produits, push d’offres personnalisées sur le mobile, information produit via QR Code ou NFC, paiement sans contact…
Néanmoins, aucune solution claire n’a pu réellement émerger, parce que la digitalisation doit s’accompagner de changement de processus opératoires importants modifiant les standards en matière de rôle des vendeurs en magasins.
A ce titre, le showrooming, tant avancé par les détracteurs du réseau physique comme preuve de la désertion des magasins, relève bien plus de la digitalisation des points de vente que d’une véritable défiance. L’année 2013 verra cette digitalisation continuer à monter en puissance sur un mode exploratoire afin de former les vendeurs à de nouveaux modes opératoires.
De manière générale, opposer internet et les magasins n’a pas de sens. Ces canaux se complètent. Le premier permet de mieux mailler son territoire et d’adresser le consommateur durant des moments spécifiques pour dynamiser sa consommation. Le second constitue l’essence même de l’expérience shopping à travers l’aventure sensorielle qui y est proposée.
Ce qui changera en 2013, c’est surtout notre perception de cette histoire. Le commerce en ligne ne tue pas les magasins en dur tout autant que le tout-physique n’existe plus. Une fois de plus, c’est la raison qui l’emportera par KO sur la passion.
Jérémie Herscovic, président de Socloz.com
Jérémie Herscovic, président de Socloz.com